Le centre agroécologique des Amanins, ce sont 20 années d’expérimentations vivantes de l’agroécologie. Une trajectoire riche et mouvementée qui, en même temps d’acquérir une certaine maturité, traverse des turbulences, un moment d’évolution qui révèle ses fragilités, teste sa robustesse et ouvre une voie nouvelle.

Le projet des Amanins, en ces temps incertains et déstabilisants, est invité à se réinventer et, nous avons même envie de dire, à se « régénérer » et cela est enthousiasmant.

Régénérer les Amanins

Ce terme de régénération, qui vibre fortement dans les milieux de la transition écologique et sociale, résonne profondément avec le sens et l’histoire du projet des Amanins.

La régénération est cette faculté qui consiste pour une entité vivante à être en mesure de se reconstituer et de retrouver sa vitalité. Elle prend aujourd’hui un sens sociétal en invitant les organisations et les individus à créer des initiatives qui favorisent les conditions propices au vivant en prenant soin des écosystèmes sociaux et écologiques ainsi que des individus qu’ils soient humains ou autres qu’humains.

Nous pensons qu’elle peut être pour les Amanins une nouvelle étape dans sa trajectoire agroécologique car elle est pour nous une continuité du mouvement écologique et humaniste cher à Pierre Rabhi qui relie la Bio, l’agroécologie, la permaculture et les nouvelles notions telle la bio-inspiration et le Vivant.

Elle est une manière plus nouvelle d’exprimer les trois composantes majeures qui ont fondé les Amanins :

• La coopération et l’éducation à la paix à travers l’école du Colibri et le travail pédagogique mené par Isabelle Peloux auprès des enfants.
• Un entrepreneuriat qui ne consisterait pas à détruire en s’accaparant mais à favoriser des conditions propices au Vivant, expérimenté par Michel Valentin dans son souhait de créer une SCOP de production liée à la terre.
• Une éthique de vie agroécologique qui met au cœur de son développement le respect de la terre et de ceux qui la cultivent, ainsi qu’une sobriété heureuse qui nous invite, entre autres, à arbitrer nos choix à travers la pensée de Pierre Rabhi.

Nous souhaitons explorer cette notion de régénération avec humilité pour en comprendre le sens profond et sentir les évolutions de posture et de pratiques qu’elle implique et qu’elle pourra susciter pour la suite de notre histoire.

Régénérer, oui, mais en conscience

Cependant, au regard de la montée en puissance de cette notion et de la capacité de récupération et de déformation nocive de notre société à des fins purement commerciales et d’intérêts individualistes, nous souhaitons poser un cadre à cette exploration opérationnelle pour qu’elle évolue dans l’éthique de l’intérêt général, des communs et de la solidarité.
Aux Amanins, nous pensons que la régénération est une notion qui n’a de sens :

• qu’à travers la pratique concrète de notre lien à la terre, et que cela doit prioritairement passer par une valorisation de l’agriculture comme un fondement de la santé sociale et écologique de notre société.
• que si elle est ancrée dans un territoire et qu’elle agit au service de ce dernier. Pour les Amanins, il s’agit de la vallée de la Drôme et du bassin versant de la petite rivière de la Grenette. Il ne s’agit pas uniquement de régénérer le centre agroécologique, nous avons envie de penser que si nous participons à la régénération du territoire qui nous accueille, alors cela se répercutera sur la santé du centre.
• qu’à travers une posture d’ouverture et de coopération, dont l’intention est de prendre soin des relations et des liens et de cultiver ainsi un bien vivre ensemble, pacifié et constructif.
• enfin, que si elle favorise une économie « symbiotique » comme défini par Isabelle Delannoy qui se base sur l’équité, la solidarité et le respect des communs universels.

La régénération que les Amanins souhaitent explorer est une posture du prendre soin, de l’équité, de l’équivalence et de sens.

Un projet de recherche-action

Pour ce faire, nous avons fait appel à des compagnons de route plus aguerris que nous sur le sujet, à savoir Permalab, Les Alvéoles, Pour une hydrologie régénérative, l’ADAF et l’École pratique de la Nature et des Savoirs (Gaec de Montlahuc), Codyter, ainsi que d’autres partenaires territoriaux et nationaux avec qui nous souhaitons construire les Amanins de demain.

Cette exploration, nous allons la réaliser à travers une recherche-action sur la période de 2023 à 2026 dont les fondamentaux sont les suivants :

• Prendre appui sur la mémoire et les apprentissages des 20 premières années de vie du projet tout en faisant évoluer ce qui nous semble dépassé.
• Nous acculturer à cette notion de régénération à travers des formations et l’accueil d’initiatives qui la vivent.
• Chercher à comprendre comment nous pouvons favoriser la santé de nos paysages en cultivant l’eau et en redonnant une place à la forêt, en s’attachant à faire cela avec nos voisins du bassin versant de la Grenette et dans une dynamique inter-acteur du projet Biovallée.
• Étudier comment nos infrastructures peuvent évoluer pour répondre aux enjeux du changement climatique.
• Et enfin, faire évoluer les pratiques agroécologiques du lieu (entrepreneuriat, éducation, travail de la terre, accueil) en fonction des apprentissages et actions menées dans ce programme pour relancer une dynamique d’expérimentation à long terme.

Pour nous, la régénération est une force de vie, une manière de nous ancrer au territoire qui nous accueille, une manière de nous relier au Vivant avec qui nous le partageons.

L’équipe des Amanins